J’ai fait mes études au Centre Universitaire d’Enseignement du Journalisme de Strasbourg. Il a fêté ses 60 ans en octobre 2018. L’école se trouvait alors 10, rue Schiller dans une belle demeure Jugendstil, la Villa Knopf. Depuis 1994, il est situé au 11 de la rue du Maréchal Juin.
J’y ai passé trois belles années.
Mon cycle d’études au Centre Universitaire d’Enseignement du Journalisme a démarré en octobre 1971. Son directeur, Alphonse Irjud, qui avait auparavant dirigé la rédaction du Nouvel Alsacien, nous enseignait la presse écrite, un domaine qu’il connaissait sur le bout des doigts. Je sais, avec du recul, qu’il nous a enseigné aussi la probité, un certain humanisme et le sens de l’engagement.
Parmi mes professeurs, il y avait Yves Lavoinne, agrégé de lettres classiques, devenu docteur d’Etat avec une thèse sur « Aragon journaliste ».
Jean-Marie Cavada fut professeur de notre promotion pendant deux ans. Il venait tous les quinze jours pour nous dispenser des cours d’ audiovisuel. Strasbourg était pour lui une ville familière. Originaire d’Epinal, il a fait ses études de littératures à la faculté de Nancy puis à Strasbourg. Strasbourg fut aussi le lieu de ses premières années de journalisme de 1964 à 1969 au Bureau Régional d’ Information à l’ ORTF de Strasbourg avant de se rendre à Paris, à France Inter ou il devint, journaliste des affaires européennes et présentateur de journaux. Il y restera quatre ans avant de se rendre à Antenne 2 où Pierre Sabbagh et Jean Lefèvre le feront débuter à la télévision nationale comme chef du service de politique étrangère et présentateur du journal.
C’est à cette période, de 1972 à 1974, qu’il vint enseigner au CUEJ. Son visage était alors déjà connu car il présentait le journal de 20 h sur Antenne 2, une semaine sur deux. Jean-Marie Cavada n’enseigna plus au CUEJ à partir de 1974. Il produisit à Antenne 2 le magazine » Un homme, un jour ». Parallèlement, il devient aussi rédacteur en chef à RTL, puis directeur-adjoint à FR3 où il a créé « Soir 3 » et « Vendredi ». De 1980 à 1982, il est directeur de l’ information à TF1. Il créé en juin 1987, l’émission « la marche du siècle » sur FR3 pour laquelle il sera deux fois lauréat du « 7 d’or » du meilleur animateur de débats et trois fois lauréats du « 7 d’or » du meilleur magazine d’actualité . Il créera en 1994 La Cinquième (France 5), télévision publique éducative. Il sera ensuite PDG de Réseau France Outre Mer de février 1997 à novembre 1998, avant d’ être nommé PDG de Radio France où il sera réélu pour un second mandat en novembre 2001. Il a présenté sa démission de la présidence de Radio France en avril 2004 pour prendre une tête de liste aux élections européennes.
J’aimais les cours de Jacques Léauté, agrégé de droit à la fac de Strasbourg puis à Paris II où il dirigeait l’institut de criminologie. Il nous enseignait la sociologie de l’information.
Notre professeur d’histoire, Jean-Pierre Kintz, vibrant et débordant d’entrain, nous transmettait sa fougue. Agrégé d’histoire et Docteur d’ Etat, il fut président de la Fédération des Sociétés d’Histoire et d’archéologie d’ Alsace. Il est décédé en février 2018.
Notre professeur en sciences économiques, Jean-Paul Fitoussi, connut une belle trajectoire :il enseigna comme professeur des universités à Paris et devint le président de l’ Observatoire français des conjonctures économiques » (OFCE). Il préside depuis 2009 le Forum Nouveau, un forum économique annuel qui se déroule à l’OCDE.
Pour les cours de droit administratif et constitutionnel nous quittions l’immeuble Jugendstil pour le grand amphithéâtre de la faculté de Droit. Les cours étaient dispensés par Jean-Paul Jacqué qui devint plus tard le Doyen de cette faculté.
Henri Mercillon, professeur d’ économie politique à Paris, venait deux fois par mois à Strasbourg pour nous enseigner l’ économie de l’information, des arts de la culture.
Gérard Schuffenecker, grand reporter aux DNA, nous enseignait la recherche de l’information.
Ernest Botzung du Journal « l’Alsace » nous initiait à la mise en page et aux techniques d’ impression.
Certains soirs, nous nous rendions aux DNA, où Paul Woessner nous faisait vivre la mise en page du journal.
Pour l’enseignement de la radio, j’eus affaire à trois professeurs : Pierre André pour l’enseignement du reportage et Jean-Paul Gunsett pour la maîtrise de la voix. Je suis restée fidèle à Jean-Paul Gunsett jusqu’à la fin de sa vie en décembre 2017, que j’évoque sur une page de ce site. Les cours étaient complétés par les venues de Paris, de Jean-Claude Darrigaud, prêtre-journaliste à France 2) aujourd’hui décédé.
Jean-Claude Hahn nous sensibilisait à l’actualité, Bernard Kurt alors réalisateur à l’ORTF Strasbourg puis à FR3 Alsace nous familiarisait au monde de la télévision.
Alice Bommer nous apprenait l’usage d’un appareil photo.
Il y avait dans le lot un professeur que j’adorais entre tous : François Wentzinger, agrégé d’anglais. Qu’était-il devenu ? Lors de la rédaction en 2003 de mon livre « Ces années-là, mes souvenirs radio-télé » (La Nuée Bleue) j’ai écrit à Alphonse Irjud et j’eus pincement au cœur lorsque j’appris son décès subit dans les années 80 à Haguenau.
Nous faisions au CUEJ un journal qui s’appelait « la glèbe ». Le premier article que j’y fis figurer concernait un sex-shop qui se trouvait rue du… jeu-des-enfants. J’ai aussi proposé des articles sur les chanteurs alors à la mode qui passaient en concert : Julien Clerc, Michel Delpech ou Gilbert Montagné. Mais aussi Léo Ferré qui passait Palais des Fêtes et qui nous fit attendre 3 heures avant de nous accorder l’interview.
J’ai proposé à 20 ans, lors de ces années CUEJ, de faire des piges aux DNA. Jean Lozi, responsable des informations régionales du journal me guida vers Jean Bezu, responsable de la page « Jeunes » qui accepta mes textes, généralement de courtes nouvelles ou des poésies.
Nous sommes quelques-uns de ma promotion à exercer le métier de journaliste:
Yannick Bernardeau devint chef de service et d’agence au Quotidien de la Réunion à Saint-Pierre.
Henriette Chardak, passionnée de cinéma, devint journaliste à Antenne 2 (future France 2) avant de se consacrer à l’écriture (une dizaine de livres notamment sur Kepler, Pythagore, Cervantes) et des pièces de théâtres.
Patrick Fluckiger devint journaliste au journal L’Alsace et encadra plus tard des cours au CUEJ, comme le font de nombreux intervenant extérieurs durant l’année universitaire
Dominique Garraud devint éditorialiste à « La Charente libre » à Angoulême.
Ian Hamel est journaliste d’investigation. Il collabore en France au Point, à Intelligence Online, à la Lettre de l’Expansion ; en Suisse : au Matin Dimanche, à La Liberté et à Swissinfo. Spécialiste des services secrets et du monde arabe, il est l’auteur de « La Vérité sur Tariq Ramadan, sa famille, ses réseaux, sa stratégie » (Favre, 2007) et « L’Enigme Oussama Ben Laden » (Payot, 2008). Il a publié (aux Editions l’Archipel) « Les Bettencourt, 2013 Sarko et Cie. La République des copains », 2011 et « Xavier Bertrand, les coulisses d’une ambition », 2010.
Dominique Jung, journaliste aux DNA, chef du service « Etranger » et éditorialiste, en devint le directeur-rédacteur en chef
Claude Lejeune, journaliste aux DNA, passionné de cinéma, est décdé en novembre 2009
Patrick Lion a travaillé comme grand reporter à France 3 Rhône-Alpes
Jean-Claude Zieger, fidèle collègue et ami : comme moi il fit de la radio à partir de 1976, à la Maison de la Radio, place de Bordeaux où se trouvait aussi la télévision FR3 Alsace pour laquelle nous travaillions également, naturellement et harmonieusement. Lorsque le 1er janvier 1983, Radio France prit les radios régionales sous sa tutelle et que le personnel dut choisir (généralement avec déchirement) entre radio et télé, il opta pour la télévision dont il est aujourd’hui retraité. Passionné d’archives et de photo, il est une mine inépuisable d’infos en ces domaines.
Certains de ma promo 1974 ont pris des voies les éloignant du journalisme :
Lydie Bader est psycho-thérapeute à Lyon et auteur de livres
Martine Hamel devint professeur en Sciences Economiques et sociales au Lycée de Cayenne, puis au Congo, en Tunisie, en Nouvelle Calédonie et enfin à La Réunion où elle a pris sa retraite et continue à voyager avec son compagnon (l’Antarctique, le Japon, le Costa Rica, le canal de Panama). Je fus témoin, avec Patrick Lion de son mariage avec Ian Hamel lors de nos études au CUEJ. Alphonse Irjud les a traités de « petits cachotiers » lorsqu’ils le lui ont annoncé.
Gilbert Hanin, qui fut longtemps animateur à Radio France Alsace, devint conseiller en communication à Nantes.
Régine Jay Grillot prit la direction de l’office du tourisme des Ménuires.
Annick L’Hôte, d’abord directrice de Communication de la Chambre de Métiers du Nord à Lille, avant de devenir chargée de communication interne à l’ Agence de l’Eau Loire-Bretagne à Orléans.
Jean-Noël Reinhardt, après avoir travaillé aux DNA, devint président du Directoire de Virgin Paris.
Alain Valentini devint journaliste à France 2.
Il y avait aussi Jean-Pierre Perrin, devenu grand reporter à Libé, connaisseur du Moyen-Orient, spécialiste de l’ Afghanistan, dont le livre « Jours de poussière. Choses vues en Afghanistan » (la Table Ronde 2002) fut couronné par le Grand Prix des lectrice de « Elle ». Du temps de nos études au CUEJ, il narrait sa passion pour la tibétologie. En 1971, il obtint une bourse Renault pour aller en Himalaya. Le route le fit passer par l’ Afghanistan, pays pour lequel il eut un coup de cœur. Il retournera l’année suivante comme guide pour Nouvelles Frontières et entrera dans le pays clandestinement en 1979 après l’invasion soviétique. Il rencontrera le colonel Massoud et apportera chaque année son aide à ce pays en transportant des fonds pour aider les populations, souvent au risque de sa vie. Il est l’auteur de plusieurs récits et romans noirs. Dans son dernier livre, « Les Rolling Stones sont à Bagdad » (Flammarion) il raconte comment il a vécu la guerre en Irak.
Je savais que j’avais une photo prise en 1972 sur laquelle nous figurions tous les deux lors d’une pause café au CUEJ. C’est celle qui accompagne ce texte. Je fus étonnée de la retrouver aisément car je l’imaginais enfouie au fin fond d’un carton introuvable. Jean-Pierre y apparaît flou mais lorsque je regarde cette photo, je me trouve pleinement plongée dans mes Années CUEJ rue Schiller, des années riches, où le monde et la culture venaient à nous avec des maîtres dont je garde aujourd’hui encore la trace. Même si l’année 1972, qui me rendit orpheline de mon père, fut l’une des plus rudes de ma vie.
Le CUEJ est dirigé par Cédric Pellen. Caroline Carlot-Schmitt en est la directrice adjointe.
Il est situé 11, rue du Maréchal Juin à Strasbourg
Avez-vous aussi fait partie de cette promo 1974 ? Ou d’une autre ? Avez-vous connu ces personnes ou d’autres du CUEJ ? Si vous avez des précisions sur elles ou simplement l’envie de témoigner, n’hésitez pas à le faire par la page Contact de ce site ou par ma page Facebook.
Nota : plus de détails sur cet univers de la radio figurent dans mon livre « Ces années-là, mes souvenirs radio-télé » (la Nuée Bleue 2004)