J’ai longtemps hésité et puis je me me suis décidée, avant que l’été ne se termine, à vous narrer l’histoire la plus triste de mon été. Elle eut lieu fin juin et elle montre la cruauté et l’imbécilité des humains.
Ce cygne avait couvé pendant un mois. Ses oeufs étaient sur le point d’éclore lorsqu’il lui furent volés.
Cela s’est passé à Ostwald, sur le quai Heydt, face à la piscine.
Selon les rumeurs c’est une main humaine qui a volé ces oeufs, simplement pour le plaisir de détruire des vies en devenir.
Si des animaux avaient commis le forfait, cela aurait été moins difficile à accepter car la prédation est inscrite dans l’instinct animal.
Mais la prédation imbécile est aussi inscrite en l’humain.
Quel est l’homme ou la femme qui ne frémit pas d’horreur à l’idée que des petits sur le point de naître sont pris à leurs parents ?
Qu’a fait cette maman cygne lorsque son nid fut vidé de ses oeufs et qu’elle se retrouva entourée de ces quignons de pain et de ces objets posés par des humains bienveillants ?
Elle a eu une réaction étonnante : elle a continué à couver durant trois jours comme si de rien n’était.
Et c’était poignant de voir cet instinct de vie prolongé en dépit de l’adversité.
La maman cygne continuait à couver alors que des imbéciles lui avaient piqué les oeufs.
Peut-être le voleur d’oeufs est-il en train de me lire ?
Aura t’il un relent de regrets ? Peut-être, s’il a une conscience.
Mais tous les humains ont-ils une conscience ?
C’est la question qui me taraude en cet avant dernier jour d’été.