L’ouverture accordée aux langues et aux cultures régionales me touche autant en Belgique qu’en Suisse, qu’en Allemagne, Autriche ou en Italie.
Lorsque je me trouve dans ces pays, je revis à chaque fois avec inconfort les effets des lois surannées, inappropriées de la République française, une et indivisible, qui avec ses principes basés sur le jacobinisme, a préféré museler ses régions plutôt que de voir en elles une source vivifiante de grandissement, face au nivellement affligeant qui orchestre et menace nos jours. Je revis avec souffrance ce que l’Alsace a perdu lorsque la République a oeuvré pour l’épurer de son alémanisme -qui est son fondement et qui fait sa beauté- pour la franciser par une sournoise et irréductible mise au pas.
J’ai découvert récemment en Belgique la petite ville flamande de Leuven, si typique avec ses maisons faites de petites briques, ses murs médiévaux, son béguinage investi par les étudiants, ses maisons anciennes qui feraient presque oublier les dégâts qu’a subi la ville lors des deux guerres mondiales. Leuven est néerlandophone. On y entend aussi la langue française car il existe une communauté universitaire francophone indépendante née après une crise politique des années 60.
Leuven (Louvain en français), traversée par la rivière Dyle, est remplie de jeunes qui circulent à vélo, un rucksack sur le dos et qui insufflent de l’énergie à la ville. La ville est réputée pour être le premier centre mondial qui réunit les archives du philosophe allemand Husserl. A l’Institut supérieur de philosophie, de grands noms de la philosophie ont enseigné, notamment Derrida, Lacan, Ricoeur et Merleau-Ponty. Des hommes parlant français. Car entre gens de bon entendement, une langue n’exclut pas une autre. Une langue ne doit pas écraser une autre. Les langues sont ce que nous avons de plus précieux. Elles sont notre premier habit et forment nos fondations. Elles méritent toutes les protections.
J’imagine parfois ce qui se serait passé dans ces villes flamandes de Belgique si le royaume belge avait interdit aux petits Flamands entrant à l’école de parler leur langue maternelle comme la République monolingue a interdit la langue maternelle en Alsace dans le but d’unifier l’identité nationale.
La Belgique ne connait pas toujours l’apaisement de ses communautés. Mais force est de constater qu’au quotidien les langues y fleurissent et s’y mêlent en harmonie. La Belgique a réussi à respecter et préserver sa petite communauté germanophone à l’est de la Wallonie, une entité fédérée – 22 fois plus petite que l’Alsace- qui, avec le Belgische Rundfunk (BRF), centre de radiodiffusion belge de la communauté germanophone, bénéficie de sa radio et de sa télévision, sans mainmise venant d’un pouvoir centralisateur comme c’est le cas avec le régime français.
Pourquoi la France veut-elle réduire sa diversité culturelle ? Quand décidera t’elle de lâcher un peu de lest et de sortir de son sacro-saint pouvoir centralisateur en accordant un vrai pouvoir aux régions et en cessant de faire de Paris (qui n’est somme toute qu’un de nos 101 départements) le nombril de la décision?
Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Alors on peut garder espoir ?