Lorsque je vois la couverture du Grand Messager Boiteux de Strasbourg, ce sont des souvenirs d’enfance qui surgissent. Chaque hiver cet almanach arrivait dans la maison, entre octobre et le passage à l’An Neuf. J’étais marquée par le sourire aimable de cet homme. Il sourit alors qu’il est unijambiste et qu’il va, claudiquant d’un village à l’autre pour vendre l’almanach.
Cette jambe, il l’avait perdue à la guerre, mais laquelle ? D’autres hommes étaient revenus ainsi, de la 1ère ou de la 2e guerre mondiale. On les voyait dans chaque village.
Mais l’invalide de guerre de ce dessin de Tanconville revient des guerres napoléoniennes. Pour gagner sa vie, il a la faveur de pouvoir distribuer l’almanach et ainsi gagner quelques sous. On prête aussi aux boiteux des pouvoirs surnaturels, ce qui évidemment nourrissait mon imaginaire.
Aussi, lorsqu’il y a quelques années, je fus contactée pour écrire des articles pour cet almanach, j’ai accepté avec plaisir. Cette année, vous m’y retrouverez avec un reportage sur Antoine Jung, un boulanger alsacien qui a fait une étonnante carrière en Bavière sous la marque Elsass-Bäcker.
J’y propose aussi un reportage sur l’ail des ours dit Barlauch, avec des recettes à base de cette plante sauvage si vivifiante.
Vous verrez dans le sommaire publié sur la page Facebook du Grand Messager Boiteux les thèmes des articles abordés par mes confrères.
Le Grand Messager boiteux de Strasbourg contient comme à l’accoutumée un calendrier avec les fêtes et les cours de la lune, des prévisions météo, des recettes de cuisine, des conseils de jardinage, l’horoscope, des articles, des nouvelles, des contes et des poèmes.
Tanconville dirigea cet almanach de 1898 jusqu’à sa mort en 1936, lui insufflant un esprit que ses successeurs -Paul Casper, Jean Christian et actuellement Gérard Riebel et Gérard Grampp- ont voulu maintenir.
L’almanach est né en 1807 (il y a 212 ans !) dans sa version allemande (Der Grosse Hinkende Bote) qui n’existe plus, puis en 1814 dans sa version française.
La couverture est restée inchangée depuis 205 ans.
Dans ce monde où tout change, où tout va si vite, retrouvez ce fondamental.
Offrez-le ! Vous étonnerez plus d’un qui aura l’impression que le temps s’est arrêté.
- Ja, gibt’s de hinkede Bot noch ?
- Ah, jo, ùn er isch wuschperli wie quacksilwer.
Le Grand Messager Boiteux, nommé hinkede Bot en alsacien, vit toujours, plus fringant que jamais.
Accordez-lui votre regard.