En ce premier jour d’été, le Larousse annonce que le mot Bredele figurera dans la nouvelle édition du dictionnaire.
On peut se réjouir que ce petit gâteau fasse son entrée dans ce célèbre lexique.
La multitude de petits gâteaux confectionnés (notamment pour Noël sous le nom Wihnachtsbredle) et la magie qu’opèrent les Noëls alsaciens a sans doute contribué à cette mise en lumière.
L’ennui c’est que le mot Bredele n’est pas juste : il contient un « e » de trop. N’en déplaise à tous ceux dont le gosier s’est emparé de cette déformation, tellement dans l’air du temps, qu’elle a fini par refléter l’exactitude.
Petite révision : pour tout Alsacien qui parle correctement la langue maternelle, petit gâteau se dit : Bredel
Ce mot au singulier donne Bredle au pluriel (en haut-rhinois : Bredla, au singulier comme au pluriel).
Dire Bredele, c’est infantiliser le mot. C’est dire : « petit gâteau petit ».
La linguiste Danielle Crevenat Werner l’affirme sans ambages : « Bredele, c’est la façon bébé de dire petit gâteau« .
Cette façon de parler bébé a été saisie presque unanimement au fil des années, aussi bien par les Alsaciens qui ne pratiquent pas la langue maternelle, que par ceux qui la pratiquent mais qui ont fini par adopter ce gimmick, comme par les francophones qui prononcent « Brédeuleu ».
Au fil des années, j’ai entendu pester plus d’une personne aimant sa langue maternelle contre cette dérive.
L’accoutumance au terme bébé Bredele a tant envahi les gosiers que même le docte Larousse a fini par l’adouber.
Il eut pourtant suffi de se renseigner auprès d’un linguiste ou d’un Alsacien pratiquant correctement la langue.
Ma langue maternelle a vécu tant d’humiliations, elle fut tant bafouée par notre République que l’on n’est pas à ce détail près.
En punissant les enfants qui osaient la pratiquer à l’école, la République française a entamé après-guerre une tentative d’éradication de la langue qui a porté ses fruits.
Les efforts pour lui faire aujourd’hui retrouver un souffle sont certes louables.
Mais il est difficile de redresser le tir de ce qui fut décidé, en pleine conscience, par un pouvoir central si centralisateur.
Dessin LUL